Traditions du Vimeu — Les Conscrits 1905

Les Conscrits

 

Pour aller tirer au sort, les conscrits d’un même village se réunissent, en une bande joyeuse, se cotisent et se rendent au chef-lieu de canton dans un chariot qu’ils ont loué à cet effet et qu’ils ont orné de drapeaux et de branches de sapin. Plusieurs ont des clairons, des tambours ou des Instruments de musique. Les conscrits chantent, les musiciens s’en donnent à qui mieux-mieux, aussi bien à l’aller qu’au retour ; et tout cela ne va pas, naturellement, sans quelques stations dans les cabarets.
Le soir et le lendemain, la fête se prolonge. Les conscrits parcourent le village, le chef décoré du numéro du tirage entouré d’ornements variés, rubans, petits drapeaux, fleurs en papier, etc. Ils chantent, en groupes, des chansons de circonstance, une vieille, entre autres, qui est encore très populaire et qui dit :

 

 

Monsieur l’Maire, Monsieur l’Prefet
Ce sont deux jolis cadets.
Ils nous font tirer z’au sort,
Tirer z’au sort, tirer z’au sort,
Ils nous font tirez s’au sort
Pour nous conduir z’a la mort.

Quand les conscrits partiront
Toutes les fill’s pleureront
En disant : c’est mon amant,
C’est mon amant,c’est mon amant,
En disait: c’est mon amant
Qu’il s’en va-t-au régiment.

Au conseil de révision
I’ major i m’ dit : mon garçon,
Vous et’s bon pour le service,
Pour le service, pour le service,
Vous et’s bon pour le service,
Rémettez votre chemisse.

 

 

Avoir « bidet » c’est tirer le numéro 1.
On croit encore à la vertu des amulettes et des talismans pour avoir des numéros élevés. C’est une survivance de l’époque où les « bons numéros » faisaient optenir des dispenses.
On dit que pour avoir un bon numéro, il faut que le conscrit ait dans une de ses poches un morceau de pain bénit de la fête des Rameaux qu’une personne lui aura glissée à dessein dans cette poche sens qu’il le sache.
Des personnes disent aussi que pour ramener un bon numéro le conscrit doit mettre un crapaud dans sa poche.
Quand un conscrit part pour le tirage au sort, sa fiancée ou sa « bonne amie » doivent s’abstenir de se montrer sur son passage. Faute de cette précaution, le conscrit reviendrait avec mauvais numéro.

 

Paul Maison

 

 

Le fonctionnement de la conscription par tirage au sort est basé sur un contingent d’hommes à appeler fixé par canton. Tous les jeunes gens âgés de vingt ans sont convoqués au chef-lieu de leur canton. Chacun va tirer d’une urne un billet portant un numéro imprimé. Le nombre de soldats requis pour le contingent étant fixé à l’avance et toujours inférieur au nombre de conscrits, les numéros les plus élevés sont dispensés de toute obligation militaire. Ceux qui ont été retenus seront convoqués au conseil de révision qui déclare les jeunes gens aptes ou inaptes au service militaire. Ce conseil se tient au chef-lieu de canton, en présence de tous les notables locaux, et l’on s’y rend en grande pompe. Là, les orphelins de guerre, soutiens de famille, frères de militaires, instituteurs, séminaristes seront exemptés sur présentation de justificatifs, les autres passeront un examen médical. Parmi ces derniers, un certain nombre est dispensé pour cause de petite taille ou d’infirmités diverses, parfois simulées ou provoquées. Si le jeune homme est malgré tout déclaré « bon pour le service », il lui reste la possibilité, s’il en a les moyens, de se faire remplacer en payant quelqu’un pour effectuer le service militaire à sa place. Tout ceci explique que c’est finalement moins de la moitié des conscrits qui vont effectivement effectuer leur service militaire. Il faut savoir qu’à partir de 1832, le service militaire durait sept ans.

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