Eu-Le Tréport-Mers-les-Bains Les aurores boréales 1726-1729-1870

Une aurore boréale est un magnifique phénomène lumineux coloré qui se produit régulièrement dans le ciel nocturne de l’hémisphère nord. Dans l’hémisphère sud, un phénomène semblable se produit : on parle alors d’aurore australe.

Le 19 octobre 1726 dans une lettre adressé au journal le Mercure de France du mois de novembre de cette même année, Mr Caperon de la ville d’Eu nous raconte l’apparition d’une aurore boréale qui pour lui et devenue chose fréquente dans la région.
N’ayant pas assisté a ce merveilleux phénomène de la nature, je laisse donc Mr Caperon vous le décrire

Ce fut samedi dix neuvieme d’octobre, qu’on commença d’apercevoir, le temps étant trés-calme,sur les six heures du soir, une lumière blanchâtre vers le nord, tant soit peu élevée au desus de l’horizon , peandant que du côté du midi le ciel paroissoit plus sombre, comme s’il y avoit eu un léger brouillard, au travers duquel on ne laisoit pas que de voir les étoiles.
Environ une heure après on commença de voir au nord-est quelques endroits plus lumineux, qui se formèrent ensuite en rayons plus ou moins étendus en largeur et en hauteur,lesquels se succedoient,paroissant tantôt dans un endroit et tantôt dans un autre, ce qui gagna peu-a-peu toute la circonférence de l’horison.
Ces rayons ou colonnes, qui parroient ainsi de tous les côtés,formèrent enfin pendant un temps assez considérable diverses lignes ou colonnes de lumière permanentes, demeurant étendues et prolongées jusqu’au Zénith comme à leur centre, n’y laissant qu’un petit vuide, ou paroissoit un corps lumineux formé en demi-cercle.
Les coses étant dans cet état, il parut du coté de l’Orient des ondulations de lumière, qui s’élancoient avec une espèce de trémoussement et une précipitation surprenante, s’étendant aussi vers le haut du ciel au travers des rayons, sans néanmoins les dissiper, de pareilles ondulations parurent peu après du côté du midi.
Dans le meme temps il se forma vers l’Occident une sorte de feu sombre et immobile,d’une étendue assez considérable,qui demeura fixé au meme endroit durant un bon espace de temps,c’étoit environ sur les huit heures que le ciel paroissoit ainsi lumineux,et comme en feu de toute parts,tout le monde étoit dans les rues pour voir ce spectacle qui ne laissoit pas que d’en effrayer plusieurs,peu a prés néanmoins ces lumières se dissipèrent,ensorte qu’il n’en ressoit presque plus rien a minuit.

À cette époque ce phénomène et nommé « la lumière boréale », il est tous a fait compréhensible pour l’époque qu’un tel événement puisse mettre en émoi la population des trois villes sœurs.

Trois en plus tard, le 16 novembre 1729 le même phénomène réapparait, mais cette fois l’histoire et plus tragique du moins ce qui la précède.
C’est toujours Mr Caperon de Eu dans une nouvelle lettre au journal le Mercure de France de décembre 1729 qui nous relate les faits.

Ce phénomène est a peu prés le même que celui qui parut il y a trois ans, et qui devient depuis quelques années beaucoup plus commun qu’il n’étoit autrefois.
On l’apelle comme vous le savez « lumière Boréale » Voici comment il a été vu dans ces quartiers.
Il faut d’abord vous dire, que le mardi 15 de ce mois, veille de cette apparition, il s’éleva sur les six heures du soir une furieuses tempête, laquelle dura avec la même violence jusqu’à onze heures avant minuit.
Comme la mer étoit alors une terrible agitation, il y a lieu de croire qu’il en est arrivé plusieurs naufrages,à en juger par ce qu’il est arrivé a un bâtiment du bourg du Tréport qui est fort-pres d’ici, lequel a était brisé sur notre cote et dont tout l’équipage a péri dans les flos.
Le lendemain 16 a la même heure, savoir six heures du soir, la « lumière boréale » parut :Elle s’étendait du Nord a l’Est, paroissant trés-brillante,tantôt claire et lumineuse, et tantôt d’un rouge couleur de feu, de laquelle s’élancoient fréquemment de grands rayons ou colonnes de semblable couleur, plusieures de ces rayons étoient accompagnés d’un mouvement d’ondulation trés-violent et fréquent, qui les dissipoit, et un instant après, les faisoit reparoitre.
Tout cela marquoit qu’il y avoit dans l’air une grande agitation, il n’y en avoit pas une moindre dans la mer, puisqu’on entendoit d’ici un bruit terrible formé dans son sein, et qui s’étendoit sur toute la cote, ce qui a duré, tant pour la lumière que pour ce bruit de la mer, la nuit entiere du 16 au 17, c’est-à-dire jusqu’à la pointe du jour auquel je vous écris.

Quand j’ai lu pour la première fois cette lettre qui a porté à ma connaissance ce naufrage, je suis aussitôt parti à la recherche d’informations qui pour le moment ne m’ont pas mené bien loin, j’ai juste trouvé ce petit texte dans un article de Christian Fizzet du cercle généalogique du pays de Caux et de Seine-Maritime. (le lien se trouve dans les sources.)

Or, si la noyade n’est pas rare en bord de mer, le naufrage d’un bateau, surtout de cette taille, reste un événement rare, voire exceptionnel. Le dernier naufrage, trouvé mentionné dans les registres du Tréport, remonte à décembre 1754. Lors d’une très forte tempête, deux bateaux cordiers du Tréport disparaissent avec leur équipage : sept morts et cinq disparus. Deux autres naufrages sont encore plus anciens : mi-janvier 1726, onze disparus, et mi-novembre 1729, dix morts ou disparus.

Nous voila arrivés maintenant en 1870,on ne parle plus de phénomène assez commun, dans son article du « Courrier de la Bresle » de janvier 1870,Alexandre Bouteiller parle d’un phénomène météorologique très rare dans nos contrées.
« L’aurore boréale » se produit un lundi soir entre sept et huit heures, créant la panique dans les environs, beaucoup crut qu’un incendie venait de se déclarer, dans certaines commune voisines du Tréport, on fit même sonné le tocsin.

Je cite Alexandre Bouteiller

Ce phénomène connu sous le nom d’aurore boréale, mais dont la cause non plus que la nature n’a pus être encore suffisamment déterminée par la science, a duré prés d’une heure et demie.
Il a été aperçu sur tout le littoral de la Manche.
Son commencement se révèle d’ordinaire par l’apparition d’une lumière cendrée a laquelle a succédé particulièrement lundi une intense clarté rouge, affectant parfois la forme d’un bolide, mais reprenant bientôt celle d’un segment de cercle dont les extrémités touchaient au Nord et a l’Ouest et était comme divisé par des cercles concentriques du plus beau rouge dont la vivacité de couleur allait se dégradant jusqu’au bleu violet.
Vers huit heures trois, quarts, le phénomène a disparu,laissant une traînée lumineuse sur la mer comme s’il avait été le résultat d’éffluves parties d’un centrefixé au Nord-Ouest.

Le phénomène a pu être observé jusqu’à Foucarmont

Une magnifique aurore boréale qu’on a prise a Foucarmont comme dans beaucoup d’autres endroits, pour la lueur d’un incendie, a été remarquée lundi soir, dans la direction de Grancourt

De nos jours ont peu avec beaucoup de chance voir des aurores boréales,notamment en Normandie dans la région de Caen oui s’en est produit en 2015 et 2022.
Je vous laisse admirer cette sublime photo (de Igor Hollman) prise dans la nuit du mardi 22 au mercredi 23 juin, ce sont quelques couche-tard, lève-tôt et autres heureux noctambules qui ont pu admirer ce spectacle rare dans le Calvados, notamment vers Langune-sur-Mer, aux alentours de 2 heures du matin en juin 2015.

Sources : Mercure de France, 1 novembre 1726
                  Mercure de France, 1 décembre 1729
                  https://www.geneacaux.fr/spip/spip.php?article443
                  Courrier de la Bresle janvier 1870

Merci aux archives de Dieppe pour leurs accueil et leur sérieux

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