Du Crystal Palace près de Londres a Woincourt en Ballon Samedi 25 aout 1899

 

MM. Percival Spencer et Pollock quittant le Palais de Cristal pour la France

 

LA MANCHE EN BALLON Une traversée de cinq heures — Les impressions des aéronautes

Deux aéronautes anglais, MM. Percival Spencer et Pollock, viennent de faire la traversée de la Manche dans des conditions particulièrement curieuses et émouvantes.

Partis du Palais de Cristal, près de Londres,(Le Crystal Palace (en français : « palais de cristal ») était un vaste palais d’exposition en fonte et verre d’abord édifié à Hyde Park pour abriter la Great Exhibition de 1851, la première des expositions universelles. Il fut par la suite démonté et reconstruit, sous une forme agrandie, au sud de Londres, dans le quartier qui porte encore son nom. Il brûla en 1936.)

(Le Crystal Palace (en français palais de cristal ), près de Londres altitude 155 mètres

 

ils ont mis un peu plus de cinq heures pour faire le voyage et ont atterri à huit heures dix, aux environs de Dieppe.

Voici en quels termes un des deux aéronautes, M Spencer, raconte les péripéties de son expédition à travers les airs :

« Le temps, dit-il, était superbe; le soleil brillait de tout son éclat et c’est a peine si, dans les altitudes très élevées, nous avons rencontré une légère brume. Deux heures après le lâcher du ballon, vers quatre heures et demie, nous avons brusquement aperçu la mer. Nous nous trouvions alors au-dessus des deux petites villes de Hastings et de Saint-Léonards.

Nous nous concertâmes pour savoir si nous ne ferions pas mieux de borner là notre voyage ou bien si nous devions tenter la traversée. La délibération ne fut pas longue : après avoir compté le nombre de sacs de sable qui nous restaient, six exactement, nous décidâmes de courir la chance et de passer le détroit. Il était alors environ cinq heures et nous nous trouvions à sept mille pieds du sol. Le vent soufflait légèrement du nord ouest et nous poussait droit vers les cotes de France. Nous jetâmes un sac de sable, ce qui nous fit monter immédiatement à neuf mille pieds, et nous ne tardâmes pas à apercevoir dans le lointain la ligne blanche des falaises normandes.

Le spectacle était superbe, et je n’ai jamais éprouvé sensation pareille, pas un bruit dans l’air, pas un murmure. Le clapotement des vagues ne parvenait pas jusqu’à nous. De petits points noirs suivis d’un léger ruban foncé tachaient les eaux bleus ; c’étaient les vapeurs faisant la traversée.

A sept heures, nous jetâmes de nouveaux sacs de sable, et le ballon monta immédiatement, avec une vitesse vertigineuse, à la hauteur de onze mille pieds. La côte se dessina avec une plus grande netteté. On distinguait notamment fort bien l’embouchure de la Somme ; mais, néanmoins, nous nous trouvions encore à une distance considérable de la terre et nous commençâmes à nous demander si nous aurions assez de lest pour y arriver.

A sept heures trente-cinq, le dernier sac de sable fut jeté par-dessus les bastingages. Le ballon s’éleva de nouveau, puis, après être resté stationnaire, commença à descendre. Nous tombâmes à 8,000 pieds, puis à 1,000, et, au fur et et à mesure de la descente, notre inquiétude se changea en anxiété, parce que nous nous aperçûmes que nous nous trouvions encore à plus de douze kilomètres du rivage. Nous nous débarrassâmes de tout ce qui était inutile, cordages, sacs vides, etc., mais en vain ; la descente, ralentie un moment, s’accéléra a renouveau; nous n’étions plus qu’à 5,000 pieds de l’eau et pas un navire en vue !

11 fallut avoir recours aux moyens désespérés : nous décidâmes de sacrifier l’ancre. La corde qui la retenait fut coupée, et ce poids de 35 kilos tomba aussitôt dans la mer. En même temps, le ballon fit; un bond et, en quelques minutes, cous remontâmes à 12,000 pieds. C’était suffisant. Lorsque, à sept heures cinquante-cinq, nous recommençâmes à décliner, nous eûmes la joie de constater que nous tombions perpendiculairement à la terre ferme, et que la mer était derrière nous. Quelques minutes après, nous aperçûmes distinctement un petit bois sur lequel nous dirigeait notre chute, et notre guide-rope ne tarda pas à frôler le sol.

Encore quelques minutes et nous étions à terre, au milieu d’une foule de braves villageois accourus en toute hâte du village voisin un petit pays qui s’appelle Woincourt, entre Saint-Valéry-sur-Somme et le Tréport

Après avoir été hospitalièrement hébergés pour la nuit les deux aéronautes ont pris, le lendemain matin, le train pour Dieppe et ont refait la traversée sur un des paquebots. Le ballon, cette fois, avait été déposé aux bagages.

 

Le Progrès de la Somme, 2 août 1899

 

 

 

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Une réflexion au sujet de “Du Crystal Palace près de Londres a Woincourt en Ballon Samedi 25 aout 1899

  1. Claude HURÉ

    Bonjour,

    Article très intéressant…étant de la Picardie, je ne trouve aucune infos sur l’arrivée à Woincourt..avez-vous d’autres infos..

    Merci //Cordialement

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